
Evan Verrier, 22 ans. Ce Niortais a effectué un parcours complet en Hygiène Sécurité Environnement (HSE), du BUT au master 2. Signe particulier : il a enchaîné trois années d’alternance au sein de la même entreprise, Pierre-Guérin dans les Deux-Sèvres.
Quand un apprenti commence son récit sur cette phrase, on se met à imaginer plein de choses… « Mon dossier était prêt pour intégrer l’armée, se souvient Evan Verrier, 22 ans. J’avais fait la préparation militaire, mais mon adjudant m’a dit ‘Si vous avez l’occasion de continuer vos études, faites-le maintenant !’ En réfléchissant, je me suis dit que je pourrais obtenir un grade supérieur. »
Direction l’IUT ! La filière Hygiène, Sécurité, Environnement (HSE) lui semble la mieux adaptée à un régiment qu’il a repéré près de Saumur. Ces compétences lui seront, à coup sûr, très utiles. Les portes ouvertes de l’établissement ont fini de le convaincre. « J’ai accroché direct. » Le BUT en trois ans vient d’apparaître. Pas de problème, Evan a déjà vécu la réforme du bac, il adore essuyer les plâtres !
Lui aimerait démarrer l’alternance dès la deuxième année. Manque de chance, il ne trouve pas de contrat et doit se rabattre sur un stage de douze semaines. « J’ai cherché autour de chez mes parents à Niort parce que ma famille n’avait pas vraiment les moyens de payer un deuxième logement. J’ai pris les devants en envoyant des candidatures spontanées. »
L’industrie est son secteur de prédilection. Pierre-Guérin est la première entreprise à lui répondre. Plutôt timide, Evan se prépare à l’entretien. Il a eu un cours là-dessus en BUT1. « J’ai aussi regardé des tutos et tout lu sur l’entreprise. » Le feeling est bon, les missions annoncées lui plaisent. Bingo !
Quelques semaines passent. Très vite, Evan a l’objectif de décrocher un contrat d’apprentissage pour sa troisième année. « Il se trouve que ma tutrice de stage avait aussi cette idée afin de renforcer l’effectif sécurité de l’entreprise. » Quand les grands esprits se rencontrent… Un nouveau contrat est signé, cette fois-ci pour le diplôme de Master… à la demande d’Evan.
Une soirée entre collègues pour briser la glace
Présent en France, en Espagne et en Chine, Pierre-Guérin fabrique des cuves et des agitateurs à destination des entreprises de la pharmacie ou de l’agroalimentaire, pour le champagne notamment… La contenance de ces cuves en acier inoxydable peut aller de 10 à 100 000 litres, selon la demande du client. L’effectif du site de Niort varie selon les commandes, de 200 à 300 salariés. Ce à quoi il faut ajouter une trentaine d’apprentis comme Evan.
Pour son premier jour, Evan est très vite plongé dans le bain : « Le lundi matin, en arrivant, j’ai tout de suite participé à ma première réunion d’équipe avec la DRH notamment. Je n’avais pas encore fait le tour de l’entreprise et ma tutrice était très occupée. Je ne comprenais pas tout ce qui se disait ! » Heureusement dès le lendemain, tout le fonctionnement lui a été présenté…
Dès la première semaine, il a été invité à une soirée entre collègues du service auquel il est rattaché, les ressources humaines (RH). Une façon de briser la glace.
Pourquoi l’apprentissage ?
Evan aurait pu effectuer tout son parcours en formation initiale mais il a choisi l’alternance. « HSE, c’est beaucoup de théorie mais il faut aussi la mettre en pratique. On apprend beaucoup de choses sur le terrain. Par exemple, en cours, on nous dit d’aller vers les salariés, il faut communiquer. Mais ce n’est pas simple quand on est timide comme moi. Ma tutrice m’a donné des conseils qui m’ont vraiment aidé. »
En master, ses missions évoluent
Après le BUT3, Evan débute fin août 2024 un nouveau contrat pour ses deux années de master Sécurité Incendie. Ses missions évoluent elles aussi. « Au début, je restais beaucoup sur des aspects techniques. En master, ma mission s’est enrichie de la dimension management, pilotage de projet. Exemple : au moment de faire les plans d’évacuation des différents services, moi j’ai rassemblé les éléments de réglementation qui devaient apparaître mais j’ai délégué la mise en forme du document. »
Désormais, Evan est capable d’animer des ateliers sans notes et de répondre aux questions des salariés. Côté rémunération, Evan perçoit environ 1 400 €, soit 80% du Smic. Ce qui est plus que la règle en vigueur pour un apprenti. Il bénéficie aussi de la prime d’intéressement et des tarifs négociés du comité d’entreprise.
« Il faut se remettre dans le bain à chaque fois »
En début de M1, le rythme d’alternance change régulièrement avec beaucoup plus de cours au programme. Ce qui ne simplifie pas l’organisation de l’entreprise. « On passe d’un monde à l’autre, ça va très vite. C’est toujours compliqué de se remettre dans le bain, d’un côté comme de l’autre, quand on n’est pas venu depuis deux ou trois semaines. »
Dans les deux cas, le ressenti est bien différent : « L’entreprise compte sur ce que je fais pour son activité. Il y a un attendu et des délais à respecter. En cours c’est surtout pour moi que je travaille et, même si je veux faire les choses bien, l’ambiance est un peu moins sérieuse avec les copains de l’ENSAR. »
À Noël, Evan peut poser une semaine complète de vacances. En réalité, l’entreprise est fermée durant cette période et tous les salariés doivent rester à la maison. L’occasion pour l’apprenti de préparer ses examens.
Evan voit sa famille et ses amis régulièrement. Il a repris le foot en club cette année. Deux soirs par semaine et le dimanche après-midi. « J’avais arrêté après mon bac parce que j’avais peur de ne pas gérer mes études. » S’il a signé à Magné dans les Deux-Sèvres, ce n’est pas par hasard. Evan a retrouvé des copains d’enfance dans cette équipe avec qui il cherche à garder contact bien qu’ils aient choisi des voies différentes. Evan assure qu’aujourd’hui, il a « trouvé un bon équilibre entre vie perso et vie pro. »
Dans le bureau des étudiants
C’est l’Ensar (ex-Iriaf) à Niort, qui propose le master dans lequel est inscrit Evan. Dans sa promotion, 19 étudiants viennent de sections HSE des quatre coins de la France. Le recrutement est national. Et les expériences professionnelles sont multiples.
Histoire de faire connaissance, l’équipe d’enseignants et les anciens du BDE les ont mélangés dès le début de l’année avec d’autres masters le temps d’un escape game : la coopération est obligatoire pour s’en sortir ! Un avant-goût des projets de groupe qu’ils auront à rendre tout au long de l’année.
« On a beaucoup d’intervenants professionnels qui donnent des cours. Ils parlent de cas pratiques, de leur métier, de leur expériences. On découvre dans quel secteur on veut travailler ou pas. » Depuis le début, les étudiants s’entraident et se transmettent les cours… Pas de concurrence.
Evan est également devenu vice-président du Bureau des étudiants de l’Ensar. Avec son équipe, il organise quelques sorties (laser game…) histoire de se détendre, et une soirée guinguette avec le personnel de l’école. « Ce genre de fonctions donne le sens des responsabilités. On est garant que tout se passe bien. Une fois, j’ai aussi fait une présentation argumentée du BDE pour qu’il intègre un groupe d’associations culturelles (Niort Associations). » Ça a marché !
« Avec les collègues, je suis pris au sérieux »
Depuis son arrivée, Evan a l’impression « d’être pris au sérieux » malgré son jeune âge et son statut d’apprenti. Sa recette ? « Je reste concentré sur mes objectifs et je mêle toujours un peu d’humour quand j’ai un message à faire passer. Une fois, dans l’atelier, j’ai vu un gars qui ne voulait pas mettre ses bouchons de protection auditives, j’ai cherché à savoir pourquoi en discutant. Pour ne pas le braquer, je ne lui ai surtout pas dit qu’il risquait des sanctions administratives, même si c’était vrai en réalité ! »
Evan, comme tous les salariés, peut être confronté à des situations déroutantes auxquelles il doit s’adapter. Ce fut le cas en BUT. « Le plan d’évacuation que je devais réaliser semblait très bien, mais le jour de l’exercice, j’ai compris qu’on ne pouvait pas vraiment contrôler le facteur humain, comment il va réagir ! Il a fallu faire face à la situation. »
Au cours de l’hiver, Evan découvre une autre réalité de l’entreprise : il faut toujours compenser les arrêts maladies de ses collègues ! Sur cet aspect aussi, il est considéré comme un vrai salarié… Heureusement l’hiver est aussi synonyme de fête de fin d’année. À Noël, tout le service RH a participé à un Secret Santa. « C’est amusant de voir qui nous a offert le cadeau. Moi j’ai reçu des chocolats et une petite plante. » Et tous les collaborateurs ont été invités au restaurant par l’entreprise.
En parlant de repas, Evan bénéficie d’une cantine d’entreprise tous les jours de 11h30 à 14h. « On met de l’argent sur une carte, une part est payée par l’entreprise, c’est très correct. » Et à l’école, il peut profiter de menus à 0,30 € grâce au Crous et au CFA Sup Nouvelle-Aquitaine.
À partir de fin avril 2025, Evan est à 100% en entreprise. Terminé les révisions du soir ! Enfin pas tout à fait… « En mai, j’ai encore pas mal d’écrits à rendre mais je gère mon temps libre », explique-t-il. Étudiant ou salarié ? Le vrai changement de statut a eu lieu quand Evan a formé sa première stagiaire. Elle était en Bac Pro Agent de sécurité. « Je devais l’accompagner dans son travail de tous les jours. » Le moment de transmettre ce qu’on lui avait appris était arrivé.
Mieux ! Quelques semaines plus tard, Evan a reçu un étudiant stagiaire de sa propre promo de M1… Un jeune qui n’avait pas choisi l’alternance.
De plus en plus à l’aise chez Pierre-Guérin, Evan prend de nouvelles responsabilités au fil des mois. Jusqu’à monter au front et accueillir des clients coréens. « Je leur ai présenté nos procédures en termes de sécurité, et tout cela en anglais évidemment ! J’ai appris le bon vocabulaire. C’était un challenge important pour moi et finalement j’ai vraiment aimé le faire. » Un vrai salarié à part entière.
Le CFA Sup NA a conventionné avec plusieurs structures (CROUS, etc.) pour permettre aux apprentis de bénéficier d’une prise en charge de 3 € par repas, des repas pris lors de périodes de formation.
L’armée ne fait plus partie de ses projets. Ce métier lui plaît. Lui se verrait bien rester chez Pierre-Guérin plusieurs années. Evan n’est pas du genre à passer d’une entreprise à l’autre. Son investissement sera-t-il récompensé ? Il lui reste encore un an d’alternance avant d’avoir la réponse.
Avec d’autres étudiants de sa promo, Evan nourrit aussi le désir de partir pour un long voyage. Peut-être au Costa Rica pour découvrir la biodiversité locale et de beaux paysages. « J’adore voyager. Et c’est le bon moment, après ce sera sûrement plus difficile quand je serai davantage inséré dans une vie sociale. ». De nouvelles perspectives s’ouvrent devant lui…
Redaction : Romain MUDRACK
Dernière mise à jour le 03 octobre 2025